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Les Quatre Espaces

les instruments Empreintes et Masses spatiales

Le son fixé | Le son réduitCritères ou paramètres | Les deux critères


Au sein de l'espace composé - l'espace intrinsèque -, l'acousmate joue d'une manière complexe avec les deux espaces du son. C'est au minimum des traces, des indices que l'auditeur peut se représenter comme des images d'espaces, c'est aussi des choix de projection, pouvant être plus ou moins riches et inventifs en fonction du nombre de projecteurs dont il dispose et du choix de leur emplacement.
 

 Le son fixé

À partir du moment ou il est possible de répéter "un son" à l'identique, par quelque moyen de fixation que ce soit, « il devient un objet externe qui possède sa propre réalité spatio-temporelle », il est possible de pratiquer sur lui l'exercice de "l'écoute réduite" et de l'intégrer dans une démarche de composition dans laquelle cette fixation constitue à la fois le moyen et la finalité.
Pour ma part, cela fait bientôt vingt ans que je pratique cette écoute sur des sons qui intègrent leur projection, dans lesquels il n'y a pas de dissociation significative (voir la fixation) entre ce que je crée et compose et ce que je propose ensuite au public (artistiquement réussi ou raté, c'est une autre histoire !).
Il n'y a là rien d'extraordinaire en soi : chaque acousmate fait de même lorsqu'il réalise une œuvre stéréophonique qui est ensuite diffusée sous la forme d'un CD ou à la radio et écoutée grâce à deux haut-parleurs. La seule différence, riche en implications, consiste simplement à considérer que toutes les situations d'écoute peuvant suivre cette démarche, même celles qui nécessitent plus de haut-parleurs...

Ayant été formé à "l'école mixte" Schaeffer / Reibel par l'enseignement de Denis Dufour - la notion d'objet sonore, la séquence-jeu et la pratique de l'écoute réduite -, et étant naturellement enclin à une certaine exigeance de pensée, l'analyse à la fois perceptive et pragmatique de ce que je faisais m'a conduit à considérer les objets que je façonnais comme des entités, des "touts" dont l'espace que je donnais à entendre n'était pas exclu.
Je capturais, organisais les plans et les mouvements exactement comme je le faisais des hauteurs, des matières, des "images de causalité", globalement, perceptivement, profitant continuellement des deux grands cadeaux de la sono-fixation : la possibilité de saisir et de conserver les plus infimes variations des sons (le risque), et celle de pouvoir prendre le temps de les observer, de prendre des décisions et de les fixer définitivement (la responsabilité).
L'espace du son est quelque chose d'indissociable de ses autres aspects, représente un critère particulier complémentaire de ceux que Schaeffer a défini *, pouvant être tous traités conjointement, que l'œuvre soit conçue pour les écoutes domestiques ou les projections publiques (voir les formules).

 

 

 Le son réduit

Une autre approche, issue de la représentation symbolique du geste instrumental - nécessaire si l'on recherche la ré-exécution de compositions musicales -, consiste à réduire les aspects du sonore à des paramètres pouvant s'intégrer dans des échelles linéaires et facilement donner lieu à des représentations visuelles.
Par la dissociation entre le son et sa "spatialisation", il est possible de réduire l'espace des sons aux notions de "position" et de "trajectoire", de la même manière que les autres aspects des sons peuvent être réduits à celles de "hauteur" et de "mélodie". Dans ce cas, le rôle des "images d'espace" est généralement réduit à la simulation de la distance et à l'acoustique virtuelle (voir le Spat de l'IRCAM).
Les trois dimensions de la géométrie euclidienne peuvent ainsi se prêter à une certaine formalisation sous la forme de paramètres, et une abstraction qui rend possible la notation pour la transmission de gestes.
Plutôt que de "son réduit", il conviendrait de parler ici de "conception réduite", car le son, s'il est produit par un instrument acoustique, bénéficie heureusement de la complexité que l'instrumentiste ajoute à la notation (et on sait ce que cela peut donner lorsque le son électronique ne bénéficie pas de cet apport...).
Les techniques de projection comme l'Ambisonic ou la WFS sont particulièrement adaptée à cette conception car elles sont basées sur des algorithmes numériques et offrent également "l'avantage" d'être relativement indépendantes des moyens de production sonore (les haut-parleurs).

 

 

 Critères ou
 paramètres ?

L'approche paramétrique telle que décrite précédemment peut être efficace dans le cadre qui est le sien : permettre à un musicien d'effectuer des actions sur un instrument qui génère ou traite des sons. Mais elle a également montré son impuissance à rendre compte de la réalité sonore. On sait en effet depuis Schaeffer que la paramétrisation du son en hauteur, timbre et intensité ne coïncide partiellement avec les sons que lorsque ceux-ci sont réduits à des espèces très simples ou lorsqu'on laisse leur complexité en dehors de la sphère compositionnelle, comme une décoration qui apporte un surcroit d'intérêt perceptif mais qui ne participe pas à l'écriture de l'œuvre.

Aborder la complexité des espaces sonores au moyen du système de critères Schaefferiens apporte au contraire un ensemble d'outils conceptuels basés avant tout sur l'écoute, seule méthode qui s'accorde à mon sens avec les ambiguïtés spatiales, et permettent d'éviter un bon nombre de pièges et de confusions...

Malheureusement, le domaine est complexe et subtile, et les catégorisations que j'ai été amené à faire peuvent paraître, au minimum, discutables.
Le problème majeur, déjà évoqué sur ces pages, est que ces critères, contrairement à ceux qui ont été définis par Schaeffer *, ne sont pas seulement des critères d'écoute mais aussi nécessairement des critères de facture et de production.

 

 

 Les deux critères
 d'espace

Je propose de nommer Empreintes Spatiales les informations spectrales perçues comme images d'espaces, pouvant éventuellement être produites avec un seul haut-parleur, et Masses Spatiales les informations constituées par les rapports des signaux répartis sur plusieurs canaux et projetés avec au moins deux haut-parleurs.
Ces deux termes définissent les deux critères d'espace de l'objet sonore, auxquels il convient d'ajouter ceux correspondant à leurs variations.
Ces termes, et les notions auxquelles ils se rapportent, n'ont de sens qu'en projection directe ou dans les variantes indirecte et interprétée, et ne peuvent a priori pas s'appliquer aux cas de la projection simulée de type HRTF ou WFS. Il conviendrait d'ajouter dans ce cas une nouvelle notion : celle de "masse-empreinte".

La dissociation entre masses et empreintes peut paraître "gênante" : elle ne correspond pas à la réalité acoustique "naturelle" (point de vue du son, voir les applications) et oblige à intégrer d'une manière ou d'une autre des informations qui sont externes au support (la méthode de projection et surtout le dispositif de projection).
Mais elle correspond bien par contre à la manière dont notre système nerveux analyse différemment la position angulaire et la distance d'une source sonore (point de vue de l'auditeur), et surtout confère à l'empreinte spatiale un statut et un rôle proche de ce que pourrait être un "critère d'image", ce qui est cohérent avec l'utilisation qui en est faite généralement en acousmatique (point de vue du compositeur) **.

Que la masse spatiale ait été absente du solfège de l'objet sonore n'est pas étonnant, compte tenu de la quasi impossibilité à l'époque de capturer, fixer et reproduire plus de deux canaux.
Plus étrange par contre est l'impasse faite sur le critère d'empreinte spatiale, et les confusions auxquelles il donne lieu.
Mais, comme l'écrit Michel Chion dans "Le Son" (p 261) : « En résumé, l'objet sonore selon Schaeffer est défini comme hors-espace. Un choix qui peut sembler d'autant plus paradoxal que c'est à partir de sons fixés sur support, sur lesquels le son peut être porteur d'un espace particulier enfermé avec lui sur la bande magnétique [l'empreinte spatiale], que l'auteur du Traité à pu le construire. Cette scotomisation chez Schaeffer de la dimension spatiale dans le son témoigne bien que celui-ci a décidé d'oublier que le son est «fixé», alors même que cette fixation reste sa seule garantie concrète d'avoir affaire au même objet sonore, et son seul moyen pour le décrire et l'observer en écoute réduite... Tels sont les détours de la découverte. »
Je que je vais essayer, bien modestement, de faire dans les pages qui suivent, c'est d'aider à combler cet "oubli"... 

 

 

 

Note s :  

* Les sept critères morphologiques de l'Objet Sonore définis par Schaeffer sont : la masse, le timbre harmonique, la dynamique, le grain, l'allure, le profil mélodique et le profil de masse.
Le danger de cette référence à la terminologie Schaefferienne peut être de sembler mal interpréter les définitions "originales", d'autant que mon approche n'est pas délimitée à la notion initiale de l'Objet Sonore mais à une conception étendue qu'on pourrait appeler "objet compositionnel".
Mais le
Traité lui même, s'il reste l'ouvrage de référence, comporte de nombreuses notions "risquées" et n'est pas exempt d'incohérences. Je ne saurais trop conseiller au lecteur de lire ou relire le "Guides des Objets Sonores" de  Michel Chion et bien sûr le "Traité des Objets Musicaux", ne serait-ce que pour prendre la mesure des différences...
Les références aux travaux de Schaeffer que l'on peut trouver tout au long de ces pages concernent plus la démarche et la méthode que la classification du
Traité proprement dite, et je rappelle encore une fois que les propositions de ces pages sont loin d'être figées et sont amenées à évoluer, à se préciser, et qu'elles constituent avant tout des outils d'investigation pour la "révélation" de zones sonores longtemps laissées dans l'obscurité.
La discussion est ouverte. 
** Je rappelle que la projection par haut-parleurs
n'a rien de "naturel" : tout comme la fixation sur support délimite un avant et un après du temps, le haut-parleur délimite un "en-deçà" et un "au-delà" de l'espace. En multiphonie (telle que définie sur ce site), cet "en-deçà" et cet "au-delà" contribuent tous deux à former l'espace de l'objet sonore, chacun étant responsable d'un de ses aspects complémentaires.